Une voie non anxiogène
Mis à jour le 02.04.2023

Dans nos sociétés modernes et une économie focalisée sur la peur de l'inconnu, une peur qui accélère les rythmes de travail et de vie, comment se réconcilier avec le temps ? Quelles dynamiques mobiliser face à l'inexploré que représente l'avenir : dynamiques d'urgence, de conscience ou autres ? Entre accélérations intempestives et immobilisme, il y va de l'équilibre des écosystèmes. Alors ici, c'est un partage sur le rythme des langages qui s'engage, pour tenter d'éclairer ce en quoi le temps, comme mouvement de la Vie, fait sens. Et par là, tenter d'entrevoir un langage commun qui lui redonnerait toute sa valeur. Analyse.

Le langage est un rythme. L'entrelacs des mots l'accélère ou le ralentisse. Et parfois, les cadences sont telles que les mots ne parlent plus, disent peu du réel, semblant en être déconnectés. Et si ces écarts se creusent, des tensions apparaissent. Car lorsque seuls les mots ciblent, des sursauts irascibles disloquent leurs rythmes, leurs articulations, jusqu'à créer des complications abyssales qui réduisent à néant le sens même du mot: "partage". Puis, s'ils persistent à restituer seuls la pensée, s'immisce une inquiétude : jusqu'où peuvent-ils rendre visible l'invisible et audible l'indicible ? Et par tous ? Étant donné que la pensée, le langage, la vie, s'entendent et se disent entre les lignes.

Pause - C'est alors que surgit une Vitalité. Oui, tandis qu'Elle s'amuse, la Muse-ique n'a pas dit son dernier mot ! Telle une soupape aux bavardages, babillages et autres embouteillages, son langage subtil, immuable et hors toutes hiérarchisations, livre encore son refrain majeur : vivifier ! Parlant ainsi à notre essentiel, cherchant à le chérir, elle nous ramène vers l'univers des Rêves. Pour n'être que des doux rêveurs ? Taratata ! Bien plutôt pour explorer dans ses racines l'énergie vitale qui la rend tantôt pure, tantôt pleine de sens et qui transcende l'éphémère. Elle devient alors l'interface de l'espérance, l'esquisse d'une voie exquise.

" Envole-toi ! ", dit-Elle. " Je peux encore te guider. Où que tu sois, je n'ai de cesse de t'attendre." Et plus on la rejoint, plus Elle se démultiplie : le temps
devient espace, et l'espace, du temps déployé. Devenant aiguillage de la Vie, Elle vibre, résonne en libérant notre capacité à nous projeter, non pas vers
l'avenir mais au présent, dans nos proximités, dans cet ici et maintenant où tout jaillit et s'envisage sans craindre le
pire. Mais, par quels procédés, me direz-vous ? Simplement, en réapprenant à questionner, à considérer l'infime qui s'invite sans en avoir l'air. Car, au
fond, tel est son Art : celui d'une juste écoute. Tout un programme, n'est-ce pas ? Passionnant au
demeurant.
" Parler est un besoin. Écouter est un art. "
Johann Wolfgang von Goethe

Alors penchons-nous sur la démarche, au cœur du programme. Car développer l'art de l'écoute, c'est partir à la rencontre d'une perception qui libère, sereinement, des processus de régénération. Il s'agit donc, dans un premier temps, d'en identifier les rouages. Il s'agit ensuite de savoir comment se les approprier. Il s'agit enfin de les traduire, dans un rapport au temps et à l'espace où le sonore nous mène vers un chemin intérieur qui restaure notre attention. Oui, là, au cœur du langage musical dont l'écoute nous parle de sa vocation première, se tisse sans cesse le fil d'un ouvrage invisible et indicible, un ouvrage où se dessine, en filigrane, une quête commune.

Élargissons encore un peu l'analyse pour observer la démarche d'un point de vue sociétal, sa capacité à impulser des cercles vertueux dans les sociétés où l'attention collective est d'abord portée vers le sens de l'ouïe, dans une logique écosystémique. Il en ressort que l'enracinement sonore, d'ailleurs largement étayé par les sciences, produit les fluidités par lesquelles chacun peut devenir partie prenante du bien commun.
Aussi se pose cette question face à l'inexploré et au fond, l'immatériel : notre premier défi ne serait-il pas de revenir à notre devenir où s'enracine l'avenir, en
mobilisant notre attention autour de l'intemporel ?

Ah, le commun ! C'est donc cela ? Oui, telle est la question. Tel est le vœu formulé, bien souvent dans des non-dits. Car le commun est au cœur du temps. Alors peut-être est-il temps d'ouvrir notre champ de perception en apprenant à reconsidérer notre écologie sonore. En effet, n'est-il pas temps de retrouver cette agilité ? N'est-il pas temps de mieux percevoir cette dimension qui donne du sens à avancer ensemble, à trouver des clés éclairantes et bienfaisantes ? En un mot : fiables. Assurément, il n'aura jamais été aussi crucial de retrouver la valeur infime et immense d'une inspiration commune, où peuvent s'oxygéner nos "rythmes" de vie, devenus anxiogènes comme jamais.

Osons, donc ! Osons encore l'écoute. Oui, osons ouvrir nos fenêtres intérieures pour y voir ce qui n'apparaît pas de prime abord. Libérons ainsi d'authentiques possibilités de partage, pour tous, chacun et la nature : il y a encore tant à explorer ! Osons relever le défi de renouveler le dialogue social en puisant dans cette vitalité. Car en cela, nos fenêtres sont encore prometteuses, n'étant pas cristallisées sur la seule géographie. Et parions qu'ainsi viennent des temps rafraîchissants, des tonalités et tempos d'espoir qui, en se joignant, ouvrent une perspective commune.
"L'imagination est plus importante que la connaissance." Albert Einstein
Kittery Abidos
Artiste consultante, ingénieure pédagogique
Conception musicale et graphique
Spécialisée en écologie sonore
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